ANISH KAPOOR / Galerie Kamel Mennour
ALMOST NOTHING
12 mai – 23 juillet 2011
Ce printemps 2011, l’artiste britannique Anish Kapoor mène de front plusieurs projets d’envergure à Paris. Dans le cadre du programme Monumenta, sa grande sculpture s’étendra sous la verrière du Grand Palais (11 mai - 23 juin). Dans le même temps, l’artiste exposera dans la chapelle de l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris un ensemble de récentes sculptures en ciment, hautes tours grises générées par un logiciel et édifiées par une machine (12 mai – 11 juin).
Pour sa première exposition personnelle à la galerie Kamel Mennour, Anish Kapoor présente un ensemble d’œuvres autour de l’idée du vide et de l’immatérialité, concepts récurrents depuis le milieu des années 1980. À la suite des Pigment Pieces qui l’ont rendu célèbre, l’artiste entreprit de creuser la pierre afin d’en tapisser l’intérieur de pigment sombre. Il s’aperçut bien vite que ce vide n’était pas vide, et qu’il ouvrait sur une obscurité insondable, pleine de la terreur que chacun pourrait y projeter.
Les sculptures réunies dans cette exposition abordent chacune une facette spécifique de l’œuvre d’Anish Kapoor, lequel fait appel à des techniques et des matériaux très divers: on y croisera des œuvres en résine, en acier miroir, en pigments ou encore en fibre de verre. Certaines ont une réelle dimension historique, en raison de la rupture qu’elles ont marquée dans la carrière de l’artiste. C’est le cas par exemple de The Healing of St Thomas, présentée à Venise en 1990, alors qu’Anish Kapoor représente la Grande Bretagne. Il s’agit de la première œuvre de l’artiste intégrant véritablement l’architecture. Elle consiste en une incision dans le mur, plaie dont l’intérieur a été tapissé de pigment rouge. Elle constitue une référence au thème catholique de l’incrédulité de Saint Thomas, la béance dans le corps du christ devenant ici une blessure dans la peau du bâtiment.
Sister (2005) se présente sous la forme d’une douce et discrète dépression creusée dans le mur, comme si ce dernier respirait. Évoquant une sorte d’umbilicus mundi, de nombril, elle est issue d’une série d’œuvres de tonalité blanche inspirées par le site d’Uluru en Australie, formes gravides qui, en raison de leur quasi invisibilité, nécessitent le déplacement du spectateur pour être perçues.
L’artiste réalise des miroirs concaves et convexes depuis le milieu des années 1990. La surface de Untitled (2011) paraît au premier abord vide, mais elle est pleine de toutes les possibilités d’un monde qu’elle avale et retourne. Ce regard renversé constitue ce que l’artiste nomme le «sublime moderne».
Né en 1954 à Bombay, il est installé à Londres depuis le début des années 1970. Son travail a rapidement gagné une considération internationale célébrée par de nombreux prix dont le fameux Turner Prize qu’il remporta en 1991. Sa démarche fit depuis l’objet de nombreuses expositions personnelles dans les musées les plus prestigieux du monde dont le Guggenheim, le Louvre, la Royal Academy, la Tate Modern, etc. Il lui a été récemment commandé de concevoir le signal marquant les prochains Jeux Olympiques à Londres, une sculpture de 116 mètres de haut intitulée « Orbit ».
ANISH KAPOOR / École des Beaux-Arts de Paris
12 mai – 11 juin 2011
Anish Kapoor investit également la chapelle de l’École nationale supérieure des beaux-arts. Dans la nef de ce monument vénérable, l’artiste installera un ensemble de ses récentes sculptures de ciment. Ces hautes tours grises évidées se présentent sous la forme de proto-architectures, sortes d’édifices des premiers temps de l’humanité, comme par exemple les ziggourats en briques mésopotamiennes. En un sens, elles renouent avec l’esprit animant les œuvres de pigments qui ont rendu l’artiste célèbre au début des années 1980. En dépit de leur facture artisanale, ces Cement Works sont conçus avec l’aide d’un logiciel, tandis qu’une machine, expulsant et déposant la matière, procède à leur édification. Ces œuvres témoignent de l’intérêt de l’artiste pour l’auto-génération, concept hérité du mot sanskrit svayambh. Les sculptures d’Anish Kapoor donnent en effet la sensation de ne pas avoir été créées par une main humaine et d’avoir toujours été là, à l’instar de certaines formes à la beauté confondante élaborées durant des millénaires par les forces de la nature: on songe aux tombants de corail, à certaines formations rocheuses… «Tout part du corps», déclare Anish Kapoor. C’est pourquoi ces œuvres ont également une dimension organique, déjà sous-jacente dans les sculptures en cire rouge réalisées au cours des dix dernières années. Les Cement Works évoquent les enroulements des intestins.
La chapelle des Beaux-arts, où fut créé le Musée des monuments français en 1791, abrite une collection remarquable de copies de peintures et de sculptures de la Renaissance italienne, notamment du Jugement dernier de Michel-Ange et du Colléone de Verrochio. Entre les formes d’Anish Kapoor, archaïques et néanmoins créées à l’aide d’une technologie de pointe, et ce qu’on estime être le plus grand raffinement jamais atteint par la civilisation occidentale, le contraste sera violent. Il questionnera sans aucun doute la nature de ce qu’on nomme l’art.
Anish Kapoor, Gallery Kamel Mennour